“J’avais trouvé un parpaing dans un coin du garage et réussi à le soulever. Je le portais à pas lents sur le sol bétonné et uni du local, à ceci près que dans mon esprit, j’étais revêtu d’un maillot de corps en peau de bête (sans doute une peau de léopard) et portais mon parpaing jusqu’au centre de la piste. La foule, nombreuse, retenait son souffle. Un projecteur d’un blanc bleuté, éclatant, suivait ma stupéfiante progression. Les visages émerveillés disaient tout : Jamais on n’avait vu d’enfant aussi incroyablement fort. “Et il n’a que deux ans !” murmurait quelqu’un incrédule.Je ne m’étais pas rendu compte que des guêpes avaient construit un petit nid dans la partie inférieure du parpaing. L’une d’elles, sans doute furieuse d’être ainsi délogée, s’en échappa et me piqua à l’oreille. Je ressentis une douleur fulgurante, comme une inspiration empoisonnée. Jamais je n’avais eu aussi mal de toute ma courte vie, mais cette douleur ne garda son caractère exceptionnel que quelques secondes. Lorsque je lâchai le parpaing sur mon pied nu, m’écrasant les cinq orteils, j’oubliai tout à fait la guêpe.” — Stephan King, Écriture, Albin Michel, 2001, p19-20 August 02, 2012 by Willy Braun